Bienvenue dans mon monde...
J'étais assise sur le sol de la Colonie, adossée au pin de Thalia, toute proche de la limite entre mon monde et celui des mortels. Mon short noir était sale, signe que j'avais passé une partie de la journée assise par terre. Mon tee-shirt orange, portant l'inscription « Camp Half Blood » était mouillé par endroit.
C'était normal, en un sens. J'avais pleuré toute la journée, sombrant quelque peu dans un état végétatif. Je n'arrivais plus à penser, plus à me concentrer sur des choses réelles. La même phrase tournait dans ma tête sans interruption, et elle me faisait souffrir, tellement souffrir. Cela me déchirait le coeur et l'âme. J'avais mal, tellement mal.
Kathleen, ma chère fille, il faut que je t'annonce quelque chose d'important. Je ne sais pas vraiment si je suis en droit de le faire mais tu es mon enfant, je me dois de te le dire. Ton père a disparu depuis plusieurs jours, il n'a pas donné signe de vie, et je m'en inquiète. Surtout, s'il communique avec toi, fais-le moi savoir. Mais, il y a eu plusieurs meurtres à Phildelphie, ces derniers mois. Je ne sais pas quoi en penser.
Depuis ce matin, depuis que j'avais reçu par la pensée le message de ma mère, Hécate, j'avais usé des dizaines de Drachnes pour contacter Iris, parce que je voulais revoir le visage de Walter. Ne serait-ce qu'une fois. J'avais prié, j'avais prié Hécate, Iris mais aussi tous les autres dieux, j'avais redoublé d'offrandes. Mais rien. Alors, vers 14 heures, je m'étais assise contre le pin et j'avais pleuré.
J'avais surveillé la colonie, la mais dans la poche de mon épée, plusieurs heures durant. Examiner les bruits suspects, lâcher un sanglot, fredonner une chanson triste, saluer un camarade, m'imaginer des scénarios horribles, pleurer encore un coup et refaire tout ce petit manège. Je n'avais même plus la force de voler, de me métamorphoser en corbeau pour franchir les hauts arbres et observer la magnifique vue qui s'étendait devant moi. Je n'avais plus de force pour rien. Sauf pour souffrir. L'idée de ma mère était bien simple : mon père était mort. Mais ce n'était tout simplement pas possible.
Il était déjà arrivé qu'il ne donne pas de nouvelles, quand il partait en Écosse voir ma famille, par exemple. Oui, cela devait être ça, cela ne pouvait être que ça, de toute manière. Je n'arrivais pas à croire à une autre de mes théories.
I will never be the same. Without you... Without you..., fredonnai-je dans ma tête, seule dans ma bulle.
J'essuyai les larmes qui coulaient sur mes joues et époussetai mes habits. Je me levai, doucement, les membres engourdis. Je continuais de chanter tranquillement, me croyant seule à plusieurs kilomètres du côté mortel et magique - les demi-dieux étant pour la plupart dans l'arène -, lorsque j'entendis un bruit. Je portais silencieusement la main à mon épée et me mordis la lèvre, habitude que j'avais quand je commençais à stresser.
Je tournais la tête en direction de la Colonie mais je ne voyais personne. Il était 18 heures, qu'est-ce qu'un demi-dieu aurait bien pu faire ici, de toute manière ? Mon instinct me souffla alors de me tourner vers la limite de la Colonie et j'aperçus une jeune fille. Ou une jeune femme, je ne sais pas, peu importe.
Va la voir !
Non ! Ne bouges pas !
Bouges tes fesses, au contraire ! Si c'était une sang-mêlée perdue, Kathleen ? Tu dois la sauver !
Idiote ! Imagine que ce soit un monstre, ou un appât, qui veuille t'extorquer. Prépares-toi à te battre mais reste ici, tu es en sécurité.
C'était comme si deux voix se détachaient dans mon cerveau, c'était vraiment un sentiment extrêmement étrange. Qui plus est, sans que je le sache, je murmurais ces phrases. Je ne savais pas qui écouter comme voix. Et, surement naïvement, je choisis de sortir de l'enceinte de la Colonie.