Vingt heures se manifesta discrètement par un petit bip de sa montre.
Se redressant derrière un tronc d'arbre, Tristan jeta un coup d’œil en direction de ce qu'il savait être la barrière magique de la Colonie. Pas un bruit, pas un mouvement ne filtrait d'entre les arbres, ce qui acheva de le rassurer. La mission qu'il s'était lui-même fixée n'avait rien de terriblement dangereuse ou autre... simplement il savait ce qui l'attendrait s'il venait à se faire attraper. Tristan Langley était parfaitement innocent, du moins à l'origine, mais ce n'était pas exactement ce que les médias avaient laissé transparaître. Et inutile de compter sur un quelconque dieu pour le sortir de là. La nuit commençait à peine à tomber, le soleil disparaissant tranquillement derrière les arbres, et le fils de Borée avait estimé qu'il s'agissait du meilleur moment de la journée pour se glisser à l'intérieur. L'atmosphère entre chien et loup le rendrait quasiment invisible et à cette heure, personne ne s'étonnerait de voir quelqu'un traverser le camp. Il n'y avait pas non plus autant de monde que dans la journée – heureusement. Son objectif était plutôt simple : essayer d'en apprendre un maximum sur cette fameuse attaque dont Loïs et lui avaient vaguement entendu parler. Il ne se sentait pas particulièrement lié à l'avenir de la Colonie mais si des mortels s'en prenaient aux sangs-mêlés, il valait mieux être au courant. Surtout quand on vivait au beau milieu de New-York, entouré de dizaines de dizaines de milliers de mortels, tous potentiellement coupables. Quant à la façon dont il allait s'y prendre pour obtenir les informations, clairement, Tristan n'en avait pas encore la moindre idée. Il lui était bien venu à l'esprit qu'il pourrait temporairement kidnapper et interroger quelqu'un mais la méthode lui semblait un peu extrême... et n'arrangerait pas franchement ses affaires. Si tant est qu'il veuille encore essayer de clamer son innocence. Dans tous les cas, il valait mieux que Loïs et lui se constituent une petite armurerie et quoi de mieux que la Colonie comme fournisseur officiel ?

Tristan contourna un énorme tronc, aperçut ce qui devait être une sentinelle – qui d'autre qu'un gardien pouvait rester assis sur un rocher avec un air d'ennui si profond imprimé sur son visage ? - et recula précipitamment, manquant de dévaler les trois quarts de la colline en trébuchant sur une racine. Il se rattrapa de justesse, s'immobilisa en priant... Rien. Sa bourde semblait être à peu près passée inaperçue. Il tripota son bracelet en tissu, hésitant entre la sensation rassurante de son arc en main et la certitude qu'il avancerait beaucoup plus vite avec ses deux mains libres. (Deux mains gauches, rappelons-le.) Le fils de Borée zyeuta rapidement derrière l'arbre : le gardien n'avait pas bougé. Parfait, reste donc planté là mon cher, et laisse-moi passer.  Se jetant à plat ventre, il se traîna sur une vingtaine de mètres à l'abri de fougère, lançant à intervalles de temps réguliers des coups d’œil à la silhouette immobile et armée.Se faire embrocher d'un coup de lance comme un cochon sauvage ne le tentait pas franchement.

Je ne cessais de repasser ce moment, encore et encore. À croire que je ne pouvais plus me décrocher de cette pensée, de ces images … elles m’obsédaient, me mettaient dans tous mes états et j'étais incapable de le contrôle. Je revoyais chaque moment, chaque action à la perfection, me remémorant chaque détail. L'attaque sur la colonie ? Nullement ! Simplement un des passages de mon livre préféré, un qui m'avait fait rêver et qui encore aujourd'hui me permettait de m'évader, de penser à autre chose et de sourire. Je venais de terminer ce chapitre, alors immédiatement je retournais en arrière pour le relire : Une histoire d'amour, celle des parents d'un des principaux antagoniste et à la fin certes tragique mais au contenu emplit d'une telle magie, d'une telle poésie que je ne résistait pas. L'auteur bénéficiait d'une plume sans pareil, même pour un roman à la base destiné aux parents pour qu'ils puissent le lire à leurs enfants pour les endormir, et il nous emportait avec une telle facilité dans un autre monde où magie, innocence mais aussi noirceur se mélangeaient à la perfection pour donner une histoire puissante et tellement plus recherché que bien des livres destinés à une audience soit disant plus mature. Finalement je fermais les yeux, le livre n'étant qu'un outil que je refermais lentement, récitant à voix basse chaque ligne, chaque phrase à la perfection car je les connaissais par cœur, non pas par une quelconque mémoire photographique, bien que la mienne n'était pas si loin de cela, mais vraiment car je l'avais lu tant de fois que je ne pouvais plus les oublier. Je rouvrais enfin les yeux, observant l'ouvrage à présent fermé et à la belle couverture dont les dessins étaient incomparable, puis posant le regard sur ma torche, plantée entre mes jambes et m'entourant de ce petit halo blanc telle sa flamme et me créant ce petit cocon illusoire, avant de lever ma tête vers les étoiles.

Oui, encore une fois j'étais de sortit nocturne, mais pour une fois cela n'était aucunement fait contre le règlement. Je tournais ma tête à gauche et à droite, observant les environs et voyant au loin d'autres demi dieu, dont un posé sur un rocher. Depuis les événement récents la garde autours des limites de la colonie avait été renforcée, pour ne pas dire rétablit vu que l'on pensait être à l'abri via la barrière magique qui était censé nous défendre. Et bien que je n'étais pas vraiment le plus apte à la tâche vu mes crises de panique récente, lorsque l'on me désigna pour prendre mon tour cette nuit, je ne fus pas contre. Ironiquement, être déjà là, observer les environs et m'assurer par moi même que personne ne viendrait était bien plus rassurant que de laisser ce job à un autre et essayer de trouver le sommeil dans un lit où je pourrais me faire exécuter si jamais les autres manquaient à leur devoir. Après tout on ne pouvait être certain que en faisant les choses par soit même et en tant qu'illusionniste de talent je ne faisais confiance qu'en mes eux, pas en ceux des autres. Et là, assit contre mon arbre, je pouvais voir quasiment toute la zone dont j'avais la charge, sans avoir à trop me déplacer, sans avoir à me révéler, camouflé par mes dons et pouvant employé mon énergie qu'à cela, à l'observation et à la lecture.

Cependant, alors que j'allais me replonger dans ma lecture, ne pensant pas qu'il y aurait quoi que ce soit ce soir, du moins l'espérant ; après tout nous les attendions ses agresseurs, alors pourquoi porterait-il une attaque dès maintenant ? En plein état d'alerte ? La tactique serait bien peu efficace ; un bruit se fit entendre non loin de ma position. Je ne bougeais pas, je ne faisais pas de bruit, ne voulant pas me faire repérer. Mon cœur cependant s'accélérait grandement, la peur montait et alors que je rangeais doucement mon livre dans mon sac pour attraper mon épée et ramasser ma torche, je pu enfin voir qui était à la source de ce que je venais d'entendre : un jeune homme dont je me souvenais qu'il était un demi dieu, Tristan, ancien compagnon d'infortune. Je soufflais de soulagement … avant de me poser des questions. En effet, je ne le connaissais que peu malgré tout, mais j'avais ouïe dire qu'il n'était plus à la colonie. Or, si la raison m'échappait totalement sur le coup, savoir pourquoi il était ici alors qu'il ne devrait pas était bien plus intriguant, surtout en le voyant se jeter de la sorte à plat ventre, trahissant un besoin de ne pas être vu. Me pinçant la lèvre inférieur, je me relevais finalement, ne pouvant le laisser continuer ainsi, pas sans surveillance du moins, tant que je ne savais pas la nature de ses intentions, demi dieu ou pas. Surtout demi dieu d'ailleurs, après tout cela n'était pas la première fois qu'une engeance semi divine agissait contre d'autres demi dieu. Ce fut le cas avec Cronos, ce fut presque le cas aussi avec les romains à cause des manipulations de Gaïa, alors pourquoi cette fois, même pour des humains exterminateur de gens de notre espèce, certains ne seraient pas de leur côté ? Même si l'idée me fit froid dans le dos. Je fis alors tourner ma main autours de la flamme de ma torche de manière répété, cette dernière entrant dans une rotation presque dansante alors qu'elle lâcha rapidement un épais brouillard dont le but était de nous couper de ce qu'il se passait autours, virtuellement du moins. J'avais besoin qu'il ne sache plus vers où il voulait aller, afin de créer des illusions si besoin pour l'empêcher d'aller où il voulait. Mais j'avais aussi besoin de rester à l'abri du regard, ne pouvant rester imperceptible comme je l'avais fait plus tôt tant que je maintenais ce brouillard, mais si je ne bougeais pas trop l'effet serait le même. Je dis alors d'une voix haute mais aucunement agressive, au contraire même, plutôt glaciale tant celle ci était neutre :

« Qu'est-ce que tu fais ici ? Pourquoi ne veux tu pas être vu ? » Toujours à l'abri de mon brouillard, si celui ci avait bien fonctionné du moins.

Spoiler:

Lancé de dés :

Couché à plat ventre derrière son tronc, Tristan mit un moment avant de se rendre compte qu'un épais brouillard montait petit à petit, occultant la vue, masquant lentement les arbres, les buissons, les dangers. Le sang-mêlé se tendit, l'oreille aux aguets, le cœur battant de plus en plus vite au fur et à mesure que le brouillard envahissait l'espace. Suite à l'agression dont elle avait été victime, la Colonie avait-elle mis au point de nouvelles techniques de défense ? De nouveaux pièges visant à arrêter n'importe qui ne vivant plus ici ? Il faillit pester à mi-voix contre son imbécillité. Putain, il n'avait même pas pensé à vérifier une telle… évidence. Vivre à l'extérieur, constamment aux aguets, ne lui faisait pas du bien a priori. À force de vivre comme une proie, il en oubliait presque que d'autres pouvaient chercher à se défendre aussi. Il se redressa à peine, prenant appui sur ses genoux, prêt à décamper au moindre bruit suspect. Malheureusement, il n'y voyait plus rien, les arbres continuant leur fonte dans le brouillard, la soirée lui paraissait tout de suite plus effrayante. « Qu'est-ce que tu fais ici ? Pourquoi ne veux tu pas être vu ? » Tristan sursauta violemment, son cœur ratant un battement, et il se retourna presque, se retrouvant assis devant… Rien. Il scruta le sous-bois envahi de brume, cherchant une quelconque silhouette, une vulgaire présence. La voix lui rappelait quelque chose, sans qu'il soit capable de ne poser ne serait-ce qu'un nom, un visage ou un souvenir dessus. Le fils de Borée se redressa lentement, en quête d'un mouvement ou d'une ombre. Machinalement, il tira sur son bracelet, faisant apparaître son arc. Le sang-mêlé tira sur la corde, cherchant le poids rassurant des flèches de l'arme. Il n'avait pas de cible, l'arc était inutile, mais on se rassurait comme on pouvait. « Les lâches se cachent. » Ben voyons, parce que lui, Tristan Langley, n'était pas un lâche peut-être. Il avait tout fui, tout, laissant passé, Colonie et désordre derrière lui. Sans se retourner, ou seulement en ignorant les quelques coups d’œil qu'il avait lancé en arrière. L'arc dans une main, la flèche dans l'autre, Tristan quitta le piètre abri de son tronc d'arbre renversé pour progresser entre les arbres, à l'affût. Le faisait-on tourner en bourrique ? N'était-ce qu'une voix enregistrée prête à parler au moindre mouvement suspect dans les bois bordant la Colonie ? La fumée se déclenchait-elle toute seule pour ajouter un effet certain à ce petit tour ? Enfin, même en se posant toutes les questions du monde, Tristan devait bien avouer qu'il crevait de trouille. Comme d'habitude, en fait.

Tristan esquissa quelques pas supplémentaires, la jointures de ses doigts blanchissant sur la flèche qu'il serrait comme si sa vie en dépendait. Il scrutait, il cherchait, il fouillait, mais rien. Et soudain, une silhouette. Discrète, effacée, immobile, mais une silhouette tout de même. « Trouvé. » Curieuse partie de cache-cache. Tristan, la flèche plaquée contre lui, progressa doucement dans la direction du garde. (Ça devait forcément être un garde pour jouer un tour pareil.) « Je me rends à la Colonie, mais je ne souhaite pas être vu, c'est tout. » J'ai tué des gens mon bonhomme, des vrais gens, de simples mortels qui vivaient leur vie et qui ont tristement croisé ma route. Ce n'est rien, rien du tout, pour certains. Pour moi c'est un meurtre, ni plus ni moins. Il en va de même pour la Colonie. Ces mots ne parvinrent pas à franchir ses lèvres à la suite des autres. Tristan prit soudainement son élan, s'étonnant presque lui-même, et se rua dans la direction de la silhouette, serrant fermement la flèche. Il la voyait, cette silhouette, il ne pouvait pas la rater. Pourtant, il passa à côté. Par quel mystère, par quelle malchance, il la loupa… bonne question. Toujours est-il qu'à l'instant où il croyait heurter quelqu'un de tout son élan, il ne rencontra que le vide, s'étalant dans la poussière. Sonné, il se redressa sur un coude et se retourna brutalement, cherchant aussi le gare des yeux. Il était là, à peu près là où il l'avait estimé. Quoi que, il l'avait peut-être vu trop à gauche. « Comment tu fais ça, toi ? » Son ton était plus agressif que prévu mais la hargne était difficile à maîtriser. « Je connais ta voix. » Il en était sûr à présent, il avait déjà entendu ce timbre de voix, cette façon de parler. Où, quand, comment, aucune idée, il ne s'en souviendrait pas sans un nom ou un visage associé. Mais il n'était pas face à un parfait inconnu, ce qui paradoxalement ne le rassura pas particulièrement.

Spoiler:

Cela avait marché, la brume avait prise et déjà je pouvais en voir ses effets sur … ma victime ? Non, il restait un intrus, tant que je n'avais pas connaissance de ses intentions il ne serait rien d'autre qu'une cible qu'il faudrait maintenir loin de n'importe quel bâtiment de la colonie. J'étais d'ailleurs étonnamment calme étant donné la situation, moi qui avait été tétanisé lors de l'attaque, alors que je faisais face à une nouvelle intrusion j'étais cette fois totalement de glace, tournant simplement ma main autours de ma torche pour maintenir l'illusion en place. Peut être était-ce son visage ? Car si lui ne voyait rien, moi je voyais à la perfection et ses traits, son regard, sa voix, cet air presque aussi froid que le mien … Tristan … je l'aimais bien, il avait toujours été bon avec moi. Enfin, il me comprenait du moins. Moi ce que je n'avais jamais compris c'est la raison de son départ. Si cela était possiblement une affaire connue pour les autres, pour ma part je n'en avais jamais été informé. Peut être n'avait-il pas été jugé bon de le faire ? Ou plutôt personne n'avait jamais pensé à le faire, comme cela arrivait souvent. Mais pourquoi était-il revenu maintenant ? Non, cette question pouvait avoir un millier de réponse plausible … la vraie question était de savoir pourquoi il essayait de s'infiltrer alors qu'il était toujours un demi dieu ? Et c'était bien là la question que je lui avait posé, le faisant sursauter alors qu'il se rendait compte qu'il n'était pas seul comme il l'aurait espéré, me traitant par la même occasion de lâche. Je riais.

« Mais ne te cachais tu pas une seconde avant ? Et pourquoi me montrerais-je alors que caché j'ai l'avantage ? »

Je me fichais bien de la lâcheté ou de l'honneur, c'était abstrait, il n'y avait que le résultat. Or rester dans l'ombre, ou plutôt la brume, me donnait un avantage tactique conséquent pour moi qui n'était pas vraiment un combattant né. Alors évidemment que je me cachais et dans cette situation précise je n'en avais aucunement honte. Lui en attendant me cherchait, dégainant son arc et scrutant les environs. Il ne semblait pas à l'aise, je le sais car si il y avait bien une chose qui me terrifiait c'était de ne pas savoir où se trouvait mes ennemies, la raison même qui créait toute mon angoisse sur ces humains meurtriers. Mais cela ne m'empêchait pas pour autant d'adopter la même tactique bien que sur un cadre beaucoup plus petit. En tout cas il ressemblait beaucoup plus à un demi dieu que je ne l'avais jamais été, car dans une situation pareille, au lieu de rester tétaniser ou d'essayer de fuir son adversaire invisible, il était aux aguets, cherchant la moindre faille dans cette illusion, le moindre indice qui pourrait trahir ma présence. Chose qu'il sembla d'ailleurs trouver, du moins qu'il avait imaginé être le cas, disant m'avoir trouvé et pointant d'un air assuré vers un point dans la brume, expliquant, du moins baratinant sur sa présence ici, avant d'avancer quelque peu et de se jeter tel un fauve sur … rien ! Je ne pu m'en empêcher, j'éclatais de rire face à cette tentative qui lui avait valu un plongeons direct dans la terre, se redressant alors comme un petit chat enragé.

« Pourquoi est-ce que je te le dirais ? Ce serait idiot ! C'est comme toi qui ne veut pas me dire pourquoi tu te rends à la colonie. Que tu ne souhaites pas être vu je le remarque bien. Mais c'est pourquoi tu veux te rendre à la colonie qui m'intéresse. Or si moi je peux me permettre de ne rien révéler, si toi tu ne veux pas te perdre définitivement dans la brume tu es obligé de me répondre. C'est ton choix Tristan et, oui, tu connais ma voix, et c'est bien pour cette raison que tu n'as pas déjà une lance dans la poitrine alors ne gâche pas cette chance. »

Je faisais bien entendu référence au fait que les demi-dieux du camp était en un tel état d'alerte que beaucoup étaient capable d'attaquer sans sommation. Je n'avais nulle connaissance des crimes qu'il avait pu connaître et qui aurait possiblement pu mener au même résultat. Mais maintenant j'avais tout intérêt à ce que mon illusion tienne suffisamment longtemps pour que mon coup d'intimidation marche, au moins jusqu'à avoir les informations voulu. Car non, je n'aurais pas été capable de le perdre éternellement et je n'aimerais pas devoir avoir recours à la force pour le stopper dans sa progression sans savoir si ses objectifs étaient malicieux ou non.

Qui, qui, qui ? Cette question avait presque remplacé les autres. Qu'ils se soient jeté sur un type quasi-immatériel était une chose qu'il pouvait facilement admettre : quand on était un demi-dieu, on finissait par s'accoutumer aux bizarreries et on ne cherchait plus forcément une explication à tout. Et quand on s'appelait Tristan Langley, on était également coutumier de la malchance que l'on ne maudissait presque plus. (Presque.) En revanche, il ne supportait pas de ne pas savoir. À qui appartenait cette voix ? Au fond de lui, il le savait mais il ne parvenait plus à l'associer au bon visage, au bon nom, au bon souvenir. Qui ? Presque pour lui-même, il haussa les épaules. Franchement, c'était insupportable ! Dans tous les cas, le type parlait avec une voix sacrément posée. Genre normal, un individu s'infiltre dans le camp après une attaque meurtrière et mystérieuse mais tout va bien. Peut-être que c'était un indice sur l'identité de la voix ? Bah, ça ne l'aidait pas, là tout de suite. Le fils de Borée se massa les coudes avec une vague grimace de douleur. « Non t'as raison, reste planqué. » Il laissa passer une minuscule seconde. « C'est ce que j'aurais fait aussi. » Bien sûr que c'est ce qu'il aurait fait ! Il n'y avait que les idiots pour se précipiter vers le danger (enfin non pas qu'il représente franchement un danger lui-même) à visage et corps découverts. « Enfin, si tu tiens tellement à savoir pourquoi je suis là... » De toute façon, il était grillé. Et prisonnier. Victime d'un quelconque tour, il n'avait aucun espoir de fuir sans se perdre et finir au mauvais endroit. Et si ses quelques mois d'errance lui avaient bien appris un truc, c'était de ne pas se précipiter. Tristan prit le temps de choisir ses mots, espérant vaguement que l'illusion bizarre dans laquelle il était plongé finirait par vaciller, ne serait-ce que pour identifier son origine… et son émetteur. Depuis quand était-il devenu ainsi, à guetter la moindre brèche, la moindre occasion de fuir ? À ouvrir l’œil et à attaquer avant d'être attaqué, pour toujours être le premier, celui qui ne se laissait plus avoir ? « Tu sais... » Il lui parlait comme s'il savait parfaitement à qui il s'adressait. « … Ce n'est pas facile d'avoir des nouvelles de la Colonie quand on vit à l'extérieur. » Il n'avait certes pas vraiment essayé pour la simple et bonne raison qu'il se foutait de cet endroit comme une guigne. « Et avec ce qui vous est arrivé dernièrement... » À eux, pas à lui. Il se sentait concerné par sa proximité avec la Colonie, qui n'était jamais bien loin de New-York, mais du reste, il  avait été certain de ne plus avoir le moindre lien avec la Colonie. « Disons qu'il faut bien qu'on se renseigne, on reste des sangs-mêlés. » Lui et Loïs, parce que c'était ce qui importait vraiment maintenant. « Alors, heureux ? » Tristan ne le prenait pas pour un con, pas vraiment, mais ça n'empêchait pas un soupçon d'impatience de filtrer dans sa voix. Il lui avait dit ce qu'il venait faire ici, omettant au passage de préciser qu'il venait aussi se servir dans l'armurerie au cas où, il avait dit la vérité donc… « Bon clairement, qu'est-ce que tu fais de moi maintenant ? On va éviter de tourner autour du pot trop longtemps, tes petits tours de magie m'ag... » Tours de magie. Putain mais qu'est-ce qu'il pouvait être con parfois ! « Tes tours m'agacent, Azazel Victoria. » Voilà le nom qu'il cherchait et qui refusait obstinément de s'offrir à lui. Tristan ne connaissait pas grand monde à la Colonie, du moins pas personnellement, mais le propriétaire de la voix avait clairement fait comprendre qu'ils se connaissaient. Et les connaissances pouvant se rattacher à la magie se compter sur les doigts d'une seule main pour le fils de Borée.

Spoiler:

Il était totalement sous mon emprise ! Chose … étrange à dire vrai car je n'avais jamais eut de pouvoir sur personne, je n'avais jamais eut l'ascendant. Déjà, que je sois ici à patrouiller, c'était quelque chose d'assez exceptionnel, dû à des circonstances exceptionnelles. Je n'étais que très rarement face au danger, je restais plus généralement à l'arrière et ne prenait que peu part à tout ce qui était quêtes et autres car ce n'était pas un des points où je brillais comme l'avait déjà pu remarquer Tristan il y a longtemps de cela, quand il était encore un pensionnaire comme moi et que nous avions été obligé de faire équipe. Portait-il toujours son collier de perles ? Je n'en savais rien, tout comme je ne savais pas pourquoi il était partit … je n'étais pas celui à qui on allait dire au revoir, juste celui dont on s'éloignait et que l'on oubliait, comme c'était le cas maintenant, avant que je ne les enferme dans ma brume et leur donne l'impression de courir sur une plaine sans fin alors que la seule chose qu'ils faisaient c'était faire de micro cercles autour de la même pierre. Malheureusement je ne savais plus quoi faire à présent, je ne savais pas comment réagir car je n'osais pas l'attaquer, je n'osais pas le libérer pour autant avec tout ce qui se passait en ce moment et appeler à l'aide était compliqué, car j'avais peur, hormis de le perdre en relâchant mon attention, que quiconque j'appelle ne fasse pas preuve d'autant de jugement et frappe avant de poser les questions, surtout si il s'agissait d'un enfant d'Arès dont les envies sanguinaires avaient fait un bond depuis le massacre.

La seule chose que je pouvais faire du coup c'était le faire parler, essayer de détecter le vrai du faux mais aussi gagner du temps … du temps jusqu'à ce qu'une solution s'offre à moi. Donc je maintenais l'illusion, qu'importe ce qu'il pouvait bien me dire même si il semblait s'accorder avec moi sur le fait que dans une telle situation ne pas se montrer restait le choix le plus sage. Je parvins aussi à lui arracher quelques informations sur sa présence … venir à la colonie pour obtenir des nouvelles … Son discours était valable, mais, qu'importe mon état psychologique, je n'étais pas non plus si irréfléchis que cela. Qui donc, pour prendre des nouvelles, essayait donc de s'infiltrer en douce alors que, comme il le disait, avec l'attaque que nous avions subit dernièrement tout le monde était en alerte rouge ! Il y avait pour cela mille façons et la sienne était loin d'être claire. Donc heureux ? Non, clairement pas … et son « on » était loin d'être rassurant, tournant la tête ici et là pour voir si il était venu avec quelqu'un d'autre. Se pouvait-il qu'au même instant quelqu'un se soit faufilé par un autre endroit ? Et si la première fois qu'ils étaient rentrés à la colonie c'était grâce à l'aide d'un des notre ? Était-il possible qu'il soit le responsable de tout cela ? Était-il possible qu'il tente de réitérer son action ? Je sentais le stress monter en moi, comme un terrible torrent avant de sursauter à l'entente de mon nom, Tristan m'ayant reconnu. Essayant de calmer ma respiration, essayant de ne pas perdre mes moyens et donc mon souffle, je rétorquais, d'une voix toujours très lente mais perdant de son calme pour traduire une certaine panique :

« Est … est-ce que c'est toi qui les a amené sur nous ? Est-ce que toi et d'autres sangs-mêlés les ont aidés à entrer pour tous nous massacrer ?! Pourquoi tu tenterais de t'introduire ici sans te faire voir si tu voulais des informations ? Un simple message Iris aurait pu suffire ou même simplement te présenter normalement. » Ma voix tremblait, comme ci je pleurais face à cette idée que je trouvais des plus terrifiante. Des volutes de flammes s'échappèrent de ma torche pour prendre place dans l'espace, tournoyant autour de Tristan et petit à petit de plus en plus proche. « Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu nous veux du mal ? Pourquoi t'es partit ?! » J'étais en train de perdre le contrôle de ma personne, les flammes, grossissant et rétrécissant de manière aléatoire et peu rassurante.