01. •• QUE PENSEZ-VOUS DES DIEUX ? ET DES CAMPS ? La question se pose-t-elle vraiment ? Hermès, le parent divin de Jamie, lui a donné son pouvoir d'invisibilité. Un pouvoir qui lui a sauvé la mise (et la vie) plus d'une fois. Un pouvoir que Jamie valorise plus que tout. Il a du mal à se faire à l'idée que les dieux existent, et que l'un d'eux est son père, mais ce don qu'il lui a donné lui fait digérer la pilule bien plus aisément. Il respecte son père, faute de l'aimer et de le connaître. Et par extension, il éprouve un certain respect pour les autres dieux - ou de la peur ? sûrement de la peur, aussi. Les camps, en revanche, laissent Jamie bien plus indifférents. Grecs, romains, lui qui ne savait pas grand chose au sujet de la mythologie, qu'elle soit grecque ou romaine, n'en est que plus perdu. En dehors de ça, il se méfie des autres demi-dieux à égalité, qu'ils soient du camp jupiter ou de la colonie.

02. •• POURQUOI NE PAS ÊTRE À LA COLONIE Rester au même endroit durant des années, y être enfermé, y vivre chaque jour de la même façon, croiser les mêmes personnes sans jamais avoir un instant de paix, vivre avec d'autres personnes ? Plutôt qu'un havre de paix, c'est surtout la description d'un enfer pour Jamie. Il a besoin de bouger à son rythme, de faire les choses à sa façon. Il ne peut pas vivre vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec les mêmes personnes, surtout pas lui qui a tant besoin de temps seul, d'un minimum de vie privée. Il ne serait pas heureux, à la colonie, et si cela signifie être attaqué de temps à autres par un monstre, ainsi soit-il.

03. •• AVEZ-VOUS ENTENDU PARLER DE L'INTRUSION DE MORTELS AU SEIN DE LA COLONIE DES SANGS-MÊLÉS ET DU CAMP JUPITER ?  Jamie en a entendu parler. Il ne s'est pas spécialement impliqué. C'est moche à dire, mais le fait que la colonie ne soit même plus en sécurité lui a fait réaliser que, moins de contact il aura avec ce monde-là, mieux il se portera. Il a beaucoup de peine pour ceux qui ont été blessé, ou pire, durant l'attaque, mais de là à proposer son aide... Il est bien trop lâche pour ça. Et ça le tue. Il aimerait avoir le courage de se battre, de vouloir réagir, d'aider, mais il ne le trouve pas. Alors il fuit les évènements, fuit les informations, fuit la colonie, parce que c'est la seule façon de réagir qu'il connaît et qu'il ne sait pas faire autrement.

04. •• VOUS SENTEZ-VOUS PARTICULIÈREMENT EN DANGER OU DÉMUNI FACE À CETTE MENACE INVISIBLE ET INCONNUE, VOUS QUI ÊTES ISOLÉ À L'EXTÉRIEUR ? Au contraire. Plus Jamie évitera la colonie, plus il sera facile de se fondre dans la masse des new yorkais, dans la ville. La colonie est comme une cible gigantesque, les habitants sont tous des demi-dieux. New York permet la couverture, la discrétion, l'anonymat. Il est plus en sécurité, et certainement pas démuni. Son instinct le pousse à rester discret, et c'est bien ce qu'il compte faire : il a une vie à New York, et il y tient.

PSEUDO/PRÉNOM •• alphas. ÂGE •• 22. COMMENT AS-TU CONNU MALUM DISCORDIAE ? •• sur bazzart. COMMENT TROUVES-TU LE FORUM •• il est superbe.    AVATAR •• sebastian stan. SOUHAITES-TU UN PARRAIN ? •• je pense que ça ira.    UN DERNIER MOT •• meeeel, assieds toi faut que j'te parle ♫ (c'est cadeau)

Jamie fixe le contenu de son verre avec intensité. Il se demande souvent si c'est un des symptômes de l'anxiété, de se focaliser sur des détails totalement ordinaires jusqu'à les rendre incroyables. L'éclat du soleil sur les glaçons qui flottent dans son sirop de pêche lui donne l'impression qu'il s'apprête à boire de l'or. Il lève l'appareil photo devant son visage, appuie une fois sur le bouton. C'est à cause de moments comme ça qu'Oscar râle lorsqu'il doit trier ses photos sur l'ordinateur portable de Jamie. Il suffit de regarder assez longtemps, et tout devient suffisamment beau pour être capturé. Parfois, les photos ne rendent pas justice au moment. Parfois, une photo d'un verre de sirop au soleil est juste une photo d'un verre de sirop au soleil. « Jamie, tu bugues encore. » Il lève la tête, croise le regard d'Oscar qui à l'air d'hésiter entre l'exaspération et l'amusement. « Ta mère a encore envoyé un e-mail. Ca fait le sixième depuis ce matin, je pense que tu devrais répondre, parce qu'elle a commencé à m'en envoyer à moi. » Jamie se mord la lèvre, considérant une seconde l'idée de laisser Oscar parler à sa mère à sa place. Rien que l'image de Maureen Oswald et Oscar dans une même conversation, même virtuelle, suffit à lui faire hocher la tête. « Je vais lui répondre. » « Fais le vraiment, mec, elle va finir par se pointer ici. » Jamie hausse les épaules. Il déménage dans deux semaines, de toute façon, l'appartement qu'il a trouvé deux rues plus loin lui semblait mieux.
Ce n'est pas qu'il déteste sa mère.
C'est juste qu'il se porte mieux quand ils ne se parlent pas.
Ils n'y peuvent rien.

« Qu'est-ce que tu veux ? » Il n'y a aucune froideur dans le ton de sa voix – pas plus qu'il n'y a de chaleur. Maureen et Jamie ont toujours fonctionné comme ça. Ils traitent leur relation comme une obligation, quelque chose de professionnel. Cliniquement. « Déjeune avec moi demain. » Sa mère ne demande jamais les choses : elle les énonce comme des faits. C'est sa voix d'avocate, qui laisse les protestation s'ébranler sur ses paroles sans aucun effet. Jamie jette un œil à Oscar, qui est penché sur la télévision, manette de jeu à la main. Il fait mine d'être occupé, mais Jamie sait qu'il écoute attentivement. S'il accepte, ça signifie qu'il finira sur un blog ou dans un article de journal. Oswald et son fils surpris lors d'un repas plein d'émotions, ou une merde du genre. « J'ai du travail. » finit-il par lâcher laconiquement. Sa mère émet un son difficile à identifier. « Vendredi, alors. » Jamie ferme les yeux. « Ouais, vendredi. » Il ne pourra pas refuser indéfiniment, de toute façon. Autant en finir et être tranquille pour les six prochains mois.

C'est comme ça qu'ils ont toujours marché, Maureen et lui. Maureen, adolescente, a décrété qu'elle serait avocate et se construirait un futur digne des plus grands. Jamie n'était pas prévu, pas plus qu'il n'était voulu. Maureen n'a pas changé ses plans. Ce n'était pas qu'elle ne l'aimait, c'était qu'elle ne voulait pas d'enfant. Parce qu'il n'a jamais connu rien d'autre, Jamie ne s'en est jamais plaint. Il a été élevé par des nourrices, babysitters et autres gouvernantes que sa mère engageait à tour de rôle. Essentiellement, il n'a jamais été mêlé à la vie de Maureen autrement que pour les apparences, les photographies dans les journaux, dans les interviews. Il servait à rendre plus humaine celle que les journalistes ciblaient comme un monstre sans pitié une fois debout devant le jury. L'une des plus jeunes avocates de sa génération, élue troisième femme la plus sexy de New York dans un sondage Buzzfeed, avec la réputation d'avoir une poigne de fer et de ne rien lâcher une fois lancée dans son travail. Evidemment, avec une réputation comme celle-ci, Maureen s'est fait des ennemis. Les menaces n'étaient pas rares. Les insultes non plus. Jamie se demande parfois si c'est ce qui l'a rendu comme ça – si c'est pour ça que faire confiance est si difficile, que le regard des autres le transperce et le brûle, qu'il a du mal à respirer quand il y a trop de monde ou qu'il se sent trop exposé. Il le vivait mal, enfant. De croiser des inconnus qui reconnaissaient sa mère et les ensevelissaient d'insultes. Parfois, il aurait voulu être invisible.
Et un jour, c'est arrivé.

Personne ne remarqua, au départ. Jamie avait cette stratégie, qui consistait à se glisser dans un endroit hors de la vue des autres, puis il pensait fort, tellement fort qu'il voulait que plus personne ne puisse le voir... Et ça arrivait. Etonnamment, Maureen s'en est rendu compte la première. Jamie avait quatorze ans, et le jour où elle l'a forcé à s'asseoir face à elle pour parler est le jour où a eu lieu la plus longue conversation qu'il ait eue avec sa mère. La plus étrange, aussi. Elle lui expliqua ce qui était son secret numéro deux selon le classement de Jamie, et lui donna l'identité de son père. Hermès. Jamie connaissait aussi bien la mythologie que ses tables de multiplications : il mit du temps à comprendre l'importance de ce que lui avouait sa mère. Et, comme il aurait dû le prédire après quatorze ans de vie avec Maureen, elle en profita pour l'envoyer à la Colonie.
Jamie y resta le temps d'un été. Deux mois, durant lesquels il ne pensait qu'à une chose : partir. Ce n'est pas qu'il n'aime pas la Colonie, c'est juste qu'il est très bien dans son coin, son couteau dans la poche et sa vie mortelle à poursuivre. Il respecte les dieux en général - respecte son père, envers qui il est reconnaissant parce qu'il peut se rendre invisible grâce à lui, mais de là à vivre dans cet univers... Il a d'autres plans, et comme sa mère avant lui, il refuse de les changer pour un détail. Ces deux mois furent les seuls qu'il passa à la Colonie, l'été de ses quatorze ans. Après ça, il y retourna de temps à autres, plus par politesse ou pour se recharger après une attaque de monstres. Pas par envie.

A l'âge de dix-sept ans, Jamie décida que sa mère pouvait très bien se charger de sa réputation toute seule, et il partit voyager. Il évita l'Europe, qui grouillait de monstres. Il passa par tellement de pays qu'il ne les comptait même plus. Et en Australie, il rencontra Oscar : ce type qui fonça sans hésiter dans un cyclope décidé à dévorer Jamie. Oscar était aussi un demi-dieu, et Oscar avait aussi une envie de voyager plus forte que la peur qu'inspirait les monstres. Ils restèrent ensemble à voyager quelques semaines, avant de se séparer, non sans échanger adresses email et numéros de téléphone. Jusqu'à l'âge de vingt ans, Jamie ne resta plus de quatre mois dans le même pays. Il donnait de ses nouvelles à sa mère (tous les mois), et à Oscar (toutes les semaines, voire plus souvent). C'était... libérateur, d'une certaine façon. Loin des affaires de sa mère, loin de New York, loin de tout. Son hyperactivité permettait de tenir malgré les nuits sans sommeil. Il revendait ses photos à des journaux au hasard, à ceux qui étaient intéressés.
Et puis, à vingt-et-un ans, Jamie retourna à New York pour s'y installer. Il prit un premier appartement, à l'opposé de celui de sa mère, et commença à travailler en tant que photographe freelance. La chance fit qu'il avait un certain succès. Oscar s'installa à New York à son tour peu après les vingt-deux ans de Jamie, et leur relation reprit où elle s'était arrêtée, une amitié qui ne s'était que renforcée par le biais de leurs messages au cours des années précédentes.
Jamie retourna à la Colonie de temps à autres, mais rien ne semblait calmer l'angoisse et le poids dans son estomac dès qu'il y mettait les pieds. Là où les autres pensionnaires semblaient s'y sentir en sécurité, il se sentait enfermé. Il resta à New York.

L'annonce des attaques sur les camps grecs comme romains - une découverte qui avait rendu Jamie encore plus perplexe concernant la mythologie - lui fit l'effet d'une douche glacée. Parce qu'il aurait voulu aider, vraiment, mais que seule l'idée de s'engager dans un tel combat... Il était trop faible. Il l'est toujours. Il connaissait certains des demi-dieux qui avaient été blessés, voire tués dans l'attaque. Et il est toujours incapable de bouger. La colère est forte, brûlante, mais la peur est glaçante, et elle gagne.
Aujourd'hui, il se planque dans New York parce que c'est ce qu'il sait faire, n'ose pas proposer son aide parce que l'anxiété lui noue la gorge, et il se sent tellement inutile, faible, pas assez... Juste pas assez, en fait. Malgré le fait qu'il connaisse du monde à la Colonie, s'y soit attaché, il n'arrive pas à aller au-delà de l'angoisse que le lieu lui fait éprouver. Il est terrifié, et il ignore pourquoi. Il a parcouru le monde, découvert des dizaines de cultures différentes, affronté des situations plus que déplaisantes, mais là... Il est impuissant face à sa propre peur. C'est idiot. Lâche. Il aimerait pouvoir faire mieux.