On aurait pu croire que d'avoir le pouvoir de visualiser les liens affectifs permettaient de jouer les psychologues du dimanche assez facilement et évitait de vous froisser avec vos interlocuteurs. Non. En vérité, son pouvoir lui était surtout utile quand elle était en manque de ragot ou en manque de raison de déprimer.
Visiblement, elle avait été trop loin dans ces taquineries sarcastiques. À partir de quel moment avait-elle gaffé ? Bonne question. Il était rare que les enfants de Vénus se préoccupent de ce genre de chose et, malgré le fait qu'elle pestait contre les stéréotypes qu'on collait aux enfants de la Déesse de l'Amour, Abby y correspondait sur certains côtés. Lorsque le mal était fait, il n'était pas important de savoir ce qui avait provoqué la bêtise, mais plutôt de savoir comment la rattraper.
Elle s'excusa à sa façon. On ne pouvait pas dire qu'elle ne faisait pas d'effort ! Après tout, ce plan foireux était supposé lui apporter autant de bénéfice qu'à Hillel. Ils avaient presque fini d'établir leur stratégie, ce n'était vraiment pas le moment de se brouiller pour une bêtise. Ensuite, la Romaine poursuivit par un commentaire sur la fameuse liste des objectifs de son ami. Deux cas de figure s'offraient à elle : soit sa remarque empirait la situation, soit, au contraire, elle allait détendre l'atmosphère. À sa grande joie, elle vit le sourire pincé de son camarade s'étirer pour devenir un sourire un peu plus sincère.
Hélas, la petite accalmie ne dura pas, puisqu'un deuxième arriva dans la conversation à propos de cette histoire de quête. Honnêtement, Abby fut surprise que ce qu'elle prenait pour une idée géniale pose autant de soucis à Hillel. Comment pouvait-on manquer de confiance en soi avec des pouvoirs pareils ? Elle était tellement étonnée qu'elle n'avait pu s'empêcher de se montrer désagréable dans un premier temps. Heureusement, elle se ressaisit vite face à la tête mortifiée de son interlocuteur. Elle était aussi prête à mettre de l'eau dans son vin au sujet de la véracité de la quête qui devait marquer le début de leur fausse idylle.
En touche final, elle joua les grandes soeurs remonteuses de moral. Un truc qu'elle avait dû apprendre en passant du statut 'enfant unique' à 'membre d'une fratrie qui augmentait de jour en jour' en arrivant au Camp Jupiter. Premièrement, Abby attrapa doucement le visage du fils de Mercure, histoire qu'il arrête de se regarder ces pieds. Deuxième étape : le rassurer sur ces capacités. Sur ce point, comparer les pouvoirs était la meilleure méthode. C'était elle qui avait de bonnes raisons de déprimer niveau cadeau divin et non lui ! Chose que son interlocuteur confirma.
"Hé !" Protesta-t-elle en faisant une moue exagérer et en pinçant délicatement le nez d'Hillel.
"La bonne réponse était de dire : mais, non, Abby, tes pouvoirs sont très utile dans certaines circonstances." Répliqua-t-elle avec une malice qui trahissait le fait qu'elle n'était pas vraiment fâchée qu' Hillel confirme ne pas vouloir se retrouver coincé face à un monstre avec des aptitudes d'enfant de Vénus.
Face aux peurs que son interlocuteur continuait d'exprimer, la demi-déesse se montrait confiante. En cas de problème, il pourrait les sortir de là avec sa super-vitesse !
"Visualise Flash en train de secourir une demoiselle en détresse." Nuança-t-elle pour enlever le côté 'lâche' et 'honteux' de cette option.
Malgré toutes ces tentatives pour dédramatiser sa proposition, et l'éventualité d'un entraînement en binôme avant de se lancer dans le grand bain, Hillel recommença à baisser la tête après s'être dégagée. Abby resta les bras ballants, une mine piteuse sur la figure. Que pouvait-elle faire pour rassurer le fils de Mercure ? Ce dernier reprit la parole, aussi Abigail se montra particulièrement attentive, puisque son interlocuteur semblait inspiré. Si ce discours était un déluge de manque de confiance en soi, elle se tenait prête à lui tirer les oreilles ! En toute amitié, bien sûre. Heureusement, ce ne fut pas le cas. Hillel semblait avoir un plan définitif concernant leur mascarade. Du coup, la Romaine croisa les bras et l'écouta jusqu'au bout, sans l'interrompre.
"C'est..." Commença-t-elle. Elle marqua une pause pour décortiquer une dernière fois mentalement le plan formulé, à la recherche de la moindre petite imperfection. Pas pour le plaisir d'en faire la remarque, mais pour éviter la moindre fausse note qui pourrait révéler la supercherie.
"C'est un bon plan." Dut-elle admettre avec un hochement de tête approbateur. Elle ne savait pas si elle devait en être étonnée ou ravie. Si les fils de Mercure commençaient à pouvoir pondre de meilleur scénario romantique que les enfants de la déesse de l'amour, dans quel monde vivions-nous ?
Abby tressaillit un peu lorsqu'Hillel l'enlaça, surtout parce que ce geste fait dans son dos l'avait tiré de ces pensées. Elle afficha un sourire de voir son comparse se sentir prêt à faire une quête avec elle. Son sourire par une expression choquée, feinte, lorsque le demi-dieu parla de bisous et de pelotage.
"Petite canaille !" Commenta-t-elle en se tordant un peu de côté pour lui pincer la joue.
Ensuite, elle fit ce qu'elle n'aurait jamais pensé un jour : Abigail se dégagea doucement pour l'embrasser. Juste un baiser fugace sur les lèvres et elle recula avant qu'Hillel ne puisse en demander d'avantage. Après la montagne russe émotionnelle qu'avait été cette conversation, il l'avait bien mérité.
"On se voit demain pour l'entraînement alors." Déclara-t-elle en mimant des guillemets comme l'avait fait son interlocuteur précédemment en prononçant le mot entraînement. Sur ces mots, elle lui tourna le dos pour faire le chemin en sens inverse et de manière beaucoup moins rapide qu'à l'allée.
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