Une rencontre loin d'être imprévue

La psychologie avait toujours été un domaine qui me fascinait ! J’aimais étudier le comportement humain et discuter de ce sujet avec quiconque était sans doute l’une de mes activités préférées. Cet état de fait était sans doute justifier par mon propre état psychologique que je pouvais aisément qualifier de bancal. Depuis toujours, deux personnalités cohabitaient au fond de mon esprit et il était rare que les deux puissent coexister en totale harmonie. Nous ne partagions ni le même caractère, ni les mêmes ambitions… quant à nos envies et désirs respectifs, n’en parlons même pas !

Compte tenu de mes centres d’intérêts restreints, je ne pouvais m’accorder psychologiquement qu’avec de très rares privilégiés. Lyllian, l’ami auquel j’allais rendre visite aujourd’hui, en faisaient justement partie. Nous nous étions rencontrés dans mon cabinet psychiatrique. Etudiant en fin d’étude, il devait effectuer plusieurs stages auprès de psychiatres reconnus dans ce domaine professionnel. Lorsque j’avais reçu sa demande, je l’avais naturellement acceptée ! Durant plusieurs années, j’avais été sergent instructeur chez les marines ! Enseigner faisait partie des tâches que j’appréciais beaucoup et j’étais curieux de voir ce que les jeunes talents pouvaient réserver pour l’avenir de cette profession. Je m’étais très vite entendu avec lui ! J’admirais sa finesse de jugement et son intelligence fine et déjà très mature ! Lyllian faisait partie de ces très rares personnes auxquelles je prêtais une confiance aveugle. J’avais même fini par lui parler de ma propre instabilité psychologique lorsque Murray recommença à faire des siennes ! J’étais certain de pouvoir me fier à sa discrétion et à ses qualités professionnelles.

En revanche, j’étais loin de me douter des méthodes qu’il choisirait d’employer ! Lorsqu’il me parla de faire ressurgir la personnalité de Murray en m’exposant librement à la tentation, j’avais refusé tout net ! Je savais à quel point mon alter-ego pouvait s’avérer dangereux et je refusais d’exposer quiconque à sa folie ! J’avais pris l’habitude de me couper de tous les plaisirs de la vie de peur que les pulsions de Murray ne me fassent me réveiller dans les bras d’une inconnue ou les vêtements trempés de sang d’innocentes victimes ! Il n’y a que lorsque j’étais à l’armée que mes soirées de beuveries m’avaient apportés pleinement satisfaction. Mais je me trouvais alors avec Ben, encadré et choyé par l’unique amant que j’aies un jour pu choisir moi, sans que Murray ne vienne interférer dans mes affaires ! J’avais besoin d’effectuer ces expériences auprès d’une personne de confiance ! Je n’aurais jamais pu me détendre auprès d’un inconnu… avec une femme encore moins ! J’avais donc tout bonnement refusé son offre, espérant de tout cœur qu’il n’insisterait pas !

L’affaire semblait s’être réglée d’elle-même ! Jamais je n’entendis reparler de cette histoire et j’étais curieux de savoir quel serait son prochain plan de bataille. Il m’avait justement convié chez lui ce jour-là pour que nous puissions en parler. C'était également une bonne occasion pour moi de récupérer quelques dossiers qu'il avait emprunté de mon bureau quelques jours auparavant. Le cœur confiant, je m’étais donc rendu chez lui en début d’après-midi ! Comme il me l’avait commandé, j’étais aller chercher des plats à l’emporter dans un sympathique restaurant italien à quelques pas de son appartement ! Une fois rentré dans l’immeuble imposant où il vivait, je me dirigeais vers la réception. Je m’annonçais alors et même si le réceptionniste écorchait légèrement mon nom, je ne pris pas la peine de le corriger ! Après tout, Lyllian savait que je devais arriver vers cette heure-là ! Je grimpais les escaliers jusqu’à l’étage et y trouva la porte à moitié ouverte. Je m’approchais alors et pris soin de frapper à la porte avant d’interpeler mon ami.

- Lyllian c’est Harvey, est-ce que je peux entrer ?

N’obtenant pas de réponse. Je déposais mes deux sacs en plastique sur le sol et pénétrais dans l’appartement. J’eus à peine le temps d’ajouter un mot qu’une silhouette de femme se jeta sur moi, une crosse de hockey à la main. Dans un réflexe quasi-surhumain hérité de mon ancienne vie militaire, je plaquais la dite silhouette sur le sol. Un éclat de fureur d’un bleu cristallin brillait dans mes yeux tandis que je dévisageais la jeune femme que j’immobilisais. Les secondes passant, je pris conscience qu’elle ne semblait pas être aussi dangereuse que mon instinct avait prédit. Je relâchais alors mon emprise sur elle, mon visage d’empourprant légèrement de honte.

- Pardonnez-moi. Je… je ne sais pas ce qui m’a pris ! J’ai été surpris sur le moment. J’espère que je ne vous ai pas fait mal !

Je me relevais alors et tandis une main charitable pour l’inviter à en faire de même. Quel idiot j’avais pu être ! En même temps, ce n’était pas vraiment le comité d’accueil auquel je m’étais attendu en arrivant ici. Pouvais-je vraiment me reprocher quoique ce soit de personnel ?

- Je suis vraiment désolé ! Permettez que je me présente, je suis le docteur Harvey Prince ! J’avais rendez-vous avec Lyllian aujourd’hui-même. J’ignorais qu’il était avec une amie. Où se trouve-il ?

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Une rencontre loin d'être imprévue

En entrant dans la pièce, j’étais loin d’imaginer la surprise qui m’y attendrait. La jeune fille à la cross de hockey finit très rapidement à terre alors que je me tenais agenouillé au-dessus d’elle. A première vue la situation aurait pu sembler risible. Cependant, j’avais passé des années à faire face à ce genre d’attaque surprise. Il est évident que mes expériences passées dans l’armée et les forces de l’ordre ne me faisaient pas passé pour le plus aimable des gentlemen ! J’examinais avec soin mon assaillante, me rendant enfin compte de la réalité qui était la mienne. La demoiselle n’était pas si méchante que cela et ne représentait aucun danger. Pourtant, quelque chose dans mon instinct me titillait, comme si je devais me méfier d’elle pour une raison qui m’échappait ! Bien sûr, j’ignorais tout de la nature de la demi-déesse. Aurais-je pu relâcher mon emprise si facilement si je l’avais su ? Difficile à dire… Toujours au-dessus d’elle, j’écoutais la jeune femme me faire part de la bizarrerie de la situation. Il est vrai qu’elle était loin d’être commune. Je me dégageais alors rapidement et me relevais sans plus attendre. L’amie de Lyllian ne semblait en revanche pas pressée de bouger. Sans plus ajouter un mot, je l’observais me demandant si elle était blessée. Elle finit par m’imiter, se relevant sur ses deux jambes. Son attitude n’était plus du tout belliqueuse ! Amicale, elle finit même par rire lorsque je parlais de son amitié avec Lyllian. J’ignorais tout de cette jeune femme et des rapports qu’elle entretenait avec lui. Même si la tenue on ne peut plus décontractée de mon interlocutrice me laissa comprendre qu’ils étaient proches. Ne désirant pas en savoir d’avantage, je ne lui posais pas plus de questions. Mon esprit était lui complètement ailleurs. Jetant des regards vers les différents recoins de l’appartement, j’espérais réellement pouvoir apercevoir mon ami entrer dans la pièce. Si bien que je ne prêtais pas attention à la demoiselle qui me dévisageait avec admiration.

Je ne retournais mon attention qu’au moment où Alaska se présenta à moi. Malgré mon mal aise face à cette situation, je ne pouvais décemment pas rester devant cette demoiselle avenante sans reprendre les présentations. Je restais cependant impassible face à cette main tendue, refusant de la prendre dans la mienne. « Enchanté Alska… Comme je vous le disais, je m’appelle Harvey Prince. Je travaille avec Lyllian ». Je plantais finalement mes yeux dans les siens au moment-même où elle m’annonça l’absence de mon ami. Mon esprit se perdit alors en conjectures, mes questionnements intérieurs ne cessant de fusés dans ma tête. Pourquoi s’était-il absenté ? Il savait pourtant très bien que je devais passer le voir aujourd’hui ! Je le lui avais maintes fois répété la veille pour m’assurer qu’il n’oublierait pas. Pourquoi disait-il être parti travailler ? Est-ce que ma rencontre avec son amie en question était prévue ? Avait-il tout organisé derrière mon dos sans tenir compte de ma réticence ? Je sentais alors une boule se formé au fond de mon estomac, honteux d’avoir pu tomber dans un piège comme un gamin ! Alaska ne semblait se douter de rien. J’hochais la tête dans un silence religieux alors qu’elle justifiait ce bref changement de programme par un évènement inattendu. Quel genre d’urgences pouvait-il avoir à gérer dans un cabinet psychologie. S’il y avait eu un problème avec l’un de nos patients, ne m’en aurait-il pas parlé ?

Respectant les directives de son hôte à la lettre, elle partit chercher les dossiers qu’il était censé me remettre en mains propres. La suivant du regard impassible, je réagis cependant lorsque la pauvre Alaska failli trébuche. Avec la même efficacité que celle que j’avais eus en la plaquant au sol quelques instants auparavant, je me précipitais vers elle et amortis la chute. Puis, comme si je regrettais mon geste un peu trop précipité, je m’éloignais à nouveau d’elle. « Je vous remercie d’avoir bien voulu jouer les coursiers. Bien, je n’ai plus rien à faire ici alors ! Je vous remercie d’avoir bien voulu jouer les coursiers. Bonne journée ! » Les dossiers dans les mains, je m’apprêtais enfin à sortir. J’étais heureux de pouvoir échapper à cette situation ! Soudain, Alaska lorgna vers les deux sacs de nourriture posés à quelques pas de la porte. Silencieusement, je me tournais vers la demoiselle et retint mes paroles. J’aurais bien pu repartir en les abandonnant ici, mais cela aurait sembler bien impoli de ma part. Je soupirais donc en regardant les sacs et finis par plonger mon regard dans le sien. Un sourire timide éclaira alors mon visage. « Eh bien ce repas était prévu pour Lyllian et moi ! Mais si vous dites qu’il n’est pas là… Est-ce que… est-ce que vous voudriez bien manger avec moi ? Ce serait bien dommage de laisser perdre cette nourriture. » Bien sûr, c’était pas politesse bien plus que par plaisir que je lui proposais ! A cet instant, j’ignorais si je serais capable d’avaler quoique se soit. Ce qui devait être un bon déjeuner accompagnant un bon moment partagé entre amis prenait une tournure bien plus funeste.

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