4 ans plus tôt

A la sortie de mon hôtel, mon regard se porte vers l’Empire State Building, comme presque à chaque fois que depuis que j’ai mis les pieds à New-York. Depuis qu’un demi-dieu grec – parce que oui les grecs existent, comme je l’ai découvert depuis que j’ai quitté le camp Jupiter – m’a révélé que l’Olympe se trouve au-dessus de ce bâtiment historique, je ne peux que le regarder avec curiosité. J’ai même visité le toit de l’immeuble, mais à part quelques employés visiblement non-humains, je n’ai rien remarqué de particulier. Pour une raison qui m’échappe, les demi-dieux romains voient moins souvent les dieux que les demi-dieux grecs. Mais c’est sans doute parce que nous sommes disciplinés, et avons moins besoin d’être « surveillés ». Après m’être secoué la tête pour cesser de rêvasser, je me mets en route, un sac sur l’épaule. Ma destination est vraiment clichée, mais j’ai réalisé que je n’y avais pas mis les pieds depuis un weekend de permission alors que j’étais encore étudiant à West Point. J’ai même pris de quoi faire des croquis du château du Belvédère, une activité qui saurait m’apaiser. Il me faut toujours un temps d’adaptation pour m’habituer au changement d’ambiance entre les baraquements en plein désert dont le silence est brisé par les bruits des armes, et la vie citadine, surtout à New-York, ville débordante d’énergie, où tous les sens sont sans cesse stimulés. Étonnamment j’aime beaucoup New-York, justement pour l’espèce de chaos qui y règne et qui me fait sentir vivant. Mais en l’occurrence, ma présence en ville est dû au fait que l’un de ses habitants est un ancien camarade de combats, qui a dû quitter l’armée pour des problèmes de santé. Venu lui rendre visite, j’en profite aussi pour jouer les touristes – et disant le, me trouver de la compagnie temporaire pour passer du bon temps, et avoir des anecdotes à raconter aux autres quand je retournerai sur le terrain.

Finalement je traverse l’entrée de Central Park, qui ne se trouve pas si loin de mon hôtel, et au bout de quelques pas, je me laisse bercé par le relatif calme des lieux. Les bruits de la circulation y sont amoindris, et à part quelques sportifs, la plupart des gens se promènent calmement ou son assis pour profiter du beau temps de printemps. Suivant les indications, je m’avance dans le parc, mon regard, toujours en alerte et acéré, observant tout autour de moi. Pourtant, alors que j’en suis à moitié de mon chemin vers le château d’après la carte du parc, ce ne sont pas mes yeux mais mes oreilles qui me préviennent d’une agitation soudaine. Il me faut moins de trente secondes pour déplier mon arc et sortir mon carquois, avec des flèches en or impérial. Ensuite je m’avance, à pas de loup, en direction des hurlements qui me semblent familiers. J’ai déjà entendu ce genre de cris avant, mais je n’arrive pas à m’en rappeler avant de déboucher sur l’orée d’une clairière et de voir les créatures qui en sont à l’origine. Des harpies. Et celles dans mon champ de vision s’en prenaient à une femme, d’à peu près mon âge, et un garçon, probablement son fils. Si en temps normal, je n’aurais jamais pu catégoriser cette femme comme une descendante de dieu, le fait qu’elle tienne tête à ces monstres avec une lame en main, qui me semble être du fer styrgien, ne laisse aucun doute sur son ascendance divine. Soudain l’une des harpies parvient à se glisser dans le dos de la brune, prête à mettre la main sur l’enfant. Instinctivement je crie, autant pour prévenir la combattante que pour attirer l’attention de l’ennemie, tout en encochant une flèche : « Attention derrière ! ». Alors que la harpie regarde dans ma direction, une flèche vient lui transpercer l’œil, la transformant en tas de cendres.