Aujourd'hui, c'est le baptême du feu. Les nouveaux ont été répartis au sein des cinq cohortes. Maintenant... Maintenant il ne reste plus qu'à leur faire comprendre que Lupa, ce n'était que le commencement. Que cette dernière leur donne les outils pour réussir dans leur nouvelle vie de légionnaire, mais qu'il faut encore les affuter pour survivre en tant que demi-dieu. Et ça... Beh ça face à des gnomes d'une moyenne d'âge de douze piges, c'est assez dur à faire rentrer. Et pour cette fournée, la corvée revient à Neve. Parce que la préposée à la tâche est, semble-t-il, partie jouer les coursières pour les dieux.

C'est ainsi que devant sa personne, se tiennent les cinq nouvelles recrues de la cohorte numéro trois. Deux d'entre elles sont un peu rodées, arrivées là depuis déjà quatre mois. Mais les autres... Rien que de les voir tenir leurs armes donne à Neve l'envie de se jeter dans le Petit Tibre. Oui à ce point. Et comme elle est un peu masochiste sur les bords, les quatre bleus de la cinquième cohorte sont venus se joindre à eux. La quatrième, quant à elle, n'a envoyé que deux puceaux. La seconde cohorte, bien qu'elle eut reçu la proposition, n'avait apparemment pas tenu à ce que leurs nouveaux s'entrainent avec "le petit peuple", tandis que la première n'avait tout simplement pas de récents adhérants, mais nul doute qu'elle aurait également décliné. Onze au total, donc.

Elle se remémore encore pourquoi elle doit endurer les losers des autres cohortes. Ça avait été l'affaire d'un pari entre les trois centurions... Un pari perdu pour celui de la troisième cohorte, à en juger par l'instant présent.

Heureusement, Neve n'est pas seule dans son malheur : elle est épaulée par Cléa. Oui, oui, celle que les bleus appellent affectueusement Medusa. Enfin, aux yeux du "petit peuple", beaucoup de légionnaires des premières cohortes ressemblent à Medusa. Catoblépas, dans sa version masculine. Alors le surnom est loin d'être pertinent. On pourrait d'ailleurs se demander pourquoi la fille de Hécate lui vient en aide, elle qui n'a pourtant pas l'habitude de donner de son temps pour entretenir les classes moyennes. Eh bien... A dire vrai, Neve se pose encore la question. Parce que si ça se trouve, c'est vraiment juste pour se foutre de leurs gueules de boutonneux. Mais elle préfère penser que Cléa veut préparer les petits pour qu'ils fassent mieux front contre la nouvelle menace mortelle.

Bon... Commençons. « Si vous êtes là, ce n'est pas pour bavasser ou faire les touristes ; si vous êtes là, c'est parce que vous êtes des demi-dieux. Des romains, des légionnaires prêts à donner leur vie pour maintenir l'équilibre de la Nouvelle Rome, pour protéger et sauver les vôtres, mais aussi et avant tout pour vous sauver vous-même. Je n'ai pas envie de perdre mon temps avec des feignasses ou des crâneurs. Alors pour commencer, toi là, oui toi, tu vas me ravaler ton sourire colgate et ramener tes fesses de Mars ici. » Alors qu'elle fait un petit signe de doigt pour accompagner ses paroles, l'adolescent, Bill, quatorze ans d'après ses souvenirs, se ramène à ses côtés. C'est le plus âgé de la promo, le plus musclé, mais aussi le plus con(descendant). Typique d'un fils de Mars. « Pour commencer, votre camarade ci-présent va vous faire une démonstration de ses talents face à Cléa, notre invitée aujourd'hui. » La plupart aurait refusé le combat, mais Bill est atteint par le syndrome de Dieu, alors Neve ne se fait pas de soucis. Ses soupçons se confirment quand il commence à ricaner. C'est vrai qu'au premier coup d’œil, mis à part son fort caractère, Cléa a l'air plutôt fébrile. Mais s'il y a une chose qu'elle a appris ici, c'est de ne pas se fier aux apparences. Et elle espère bien que la plus âgée saura lui inculquer cette leçon en l'atomisant complètement.

La fille de Victoria recule de quelques pas pour laisser les deux en face à face. « Quand vous voulez. » Le silence règne. Tout le monde est dans l'expectative. Ses bras croisés sur sa poitrine, Neve s'apprête déjà à sortir un "voila ce qu'il ne faut pas faire" suivi d'autres choses fleuries qui réduiraient l'égo du bonhomme en poussière.