« Mais t'es con ou tu le fais exprès! », souffla la rouquine, à bout de nerfs. Elle regardait Ailam (encore), qui draguait ici et là, matant la moindre fille qui passait devant ses yeux. Elle en avait marre, de le voir agir comme ça. Deirdre ne comprenait peut-être pas pourquoi, mais elle savait reconnaître sa fâcheuse jalousie. Maladie qui la suivait depuis sa jeune enfance, elle avait tendance à en vouloir à ceux qui portaient leur attention ailleurs, lorsqu'elle était en leur compagnie. Oui, elle aimait qu'on la regarde, qu'on la complimente, mais quand cela venait de d'autres hommes que lui, elle s'en foutait royalement. Par exemple, Logan, qui n'avait de cesse de lui lancer des compliments et de tenter de la séduire, alors qu'il n'y parvenait pas du tout. Elle semblait immunisée aux charmes de ces messieurs, et si elle sourit parfois aux compliments et les rend, c'est pour faire rager Ailam, pour observer sa réaction. Et pourtant, elle ne se rend pas compte de tout ce qu'elle fait, et de cette même jalousie qui lui ronge le coeur sans permission...
Heureusement, il ne semblait pas avoir entendu ses paroles, trop captivé par la blonde qui lui passait sous le nez et avec laquelle il avait entamé une ô, si intéressante discussion. Pourtant, Deirdre avait bien envie de s'en mêler. D'aller les voir et d'éloigner cette gamine qui ne comprenait rien au demi-dieu. Pas comme elle. C'était son meilleur ami, son tout. Jude avait peut-être raison, après tout. Peut-être que ça s'était transformé en quelque chose de plus gros que de la simple amitié, qu'un simple je t'aime amical. Mais elle ne le voyait pas, malgré tout cela. Malgré qu'elle ressente une boule au ventre, alors qu'elle le voyait complimenter une autre nana qu'elle.

Quand la fille de Borée en eut marre, elle décida de retourner dans son bungalow. Elle chercha dans son armoire son legging moulant noir avec une jolie tunique, vêtements qui avaient le don de la mettre en valeur. Elle allait lui montrer ce que ça faisait, son petit manège. C'est la première fois que Deirdre faisait une telle chose, car habituellement, Ailam et elle, elle et Ailam, tout allait bien.
Mais aujourd'hui, rien n'allait plus. Elle enfila également ses plus belles bottes, vu que l'hiver s'était lentement installé sur Long Island. Même s'il y avait un manque flagrant de neige, la fraîcheur était tout de même présente et par dessus son habit, elle vêtit une veste en cuir. Il allait en prendre plein les dents. Sans comprendre, mais osef.

Une fois habillée, elle décida de lâcher ses cheveux roux sur ses épaules, sans les coiffer spécialement, hormis le peigne qu'elle passa dedans. Le fin maquillage sur ses yeux, sur ses lèvres. Tout semblait être prêt, dans sa tête. Et Deirdre l'était. Prête.
Ou pas. Elle faillit reculer, une fois sortie du bungalow, mais il était trop tard. On l'interpella, et plusieurs mecs sifflèrent sur son passage. Elle leur accorda un sourire charmeur et un regard qui voulait dire mille et unes choses. Elle sentit le regard de son meilleur ami sur elle, mais elle l'ignora, pour le moment. Elle continua à discuter avec le fils de Déméter qui l'avait approchée, Matt. Il était sympathique et très mignon, et il serait parfait. Diaboliquement parfait.

A la base, il ne comptait même pas venir flirter avec cette fille d'Aphrodite. Ca s'était fait par hasard, alors qu'il s'apprêtait à se rendre à l'infirmerie pour la journée. La jolie blonde n'avait cessé de lui faire de grands sourires depuis plusieurs heures désormais, et il n'avait pas mis longtemps avant de céder à ses charmes. Annabelle, du moins s'il souvenait bien de son prénom, semblait tout à fait heureuse d'avoir réussi à l'attirer dans ses filets. Et malgré tout le plaisir qu'il ressentait à la draguer, cela ne comblait pas le vide au fond de son coeur. Quelque chose - quelqu'un en était absent, et cela dérangeait grandement. Mais jamais, ô grand jamais, n'allait-il se l'avouer à lui-même. Beaucoup disaient de lui que ses nombreuses conquêtes et ses tentatives de flirt étaient une façon pour lui de fuir ses sentiments, et de s'aveugler encore un peu plus alors que les faits étaient bien là : il était irrémédiablement amoureux d'une certaine fille de Borée. Et bien qu'il eut l'air des plus intéressés par la conversation de la blonde, ce n'était absolument pas le cas. Ailam ne l'écoutait que d'une oreille distraite, plongée dans ses pensées, et imaginant où pouvait se trouver sa rouquine favorite.

Il fit mine de rire pour la énième fois en dix minutes, quand des sifflements attirèrent son attention. Il tourna la tête, et la respiration lui manqua. Elle était là, Deirdre. Vêtue de façon très explicite, qui plus est. Ailam ne s'intéressait déjà plus à la blonde -s'était-il vraiment intéressée à elle un jour?- les yeux rivés sur la rousse. Il avait l'air bien idiot, à l'admirer ainsi, les yeux écarquillés et la bouche grande ouverte. Deirdre ? Le prénom lui échappa des lèvres, alors qu'il quittait la fille d'Aphrodite -celle-ci soupira, offusquée- sans même sourciller. La rousse semblait très occupée à discuter avec un fils de Déméter. Il renifla avec colère. Il reconnaissait bien la technique qu'elle employait - pour l'employait sans cesse lui-même-. Se dirigeant vers sa meilleure amie, il vint se coller face à elle, faisant signe au fils de Déméter de déguerpir. Tu permets ?! Celui-ci s'éloigna sans même demander son reste.

Déglutissant avec nervosité, Ailam reporta son attention sur Deirdre. Tu es... hum... wow. Un manque d'éloquence flagrant, alors qu'il continuait toujours de la dévisager de haut en bas. Mais au contraire des autres filles, il ne fixa pas plus que ça son décolleté. Le demi-dieu ne parvenait tout simplement pas à détacher son regard de son visage. Il avait l'impression de véritablement la voir pour la première fois. Bien sûr, il l'avait toujours trouvé belle. Mais en cet instant, cela dépassait l'entendement. Le demi-dieu blâmait son penchant pour les rousses.

Semblant reprendre ses esprits, il finit par constater la présence d'autres mâles à leur côté, et son sang ne fit qu'un tour. Plissant les yeux, il ne retint pas sa jalousie plus longtemps. Vous avez pas mieux à faire que d'imiter les carpes ? Allez voir ailleurs si on y est ! Et voilà. Ils étaient de retour, sa jalousie maladive, ainsi que ce besoin de vérifier que personne d'autre de la gente masculine autre que lui ne l'approchait. Depuis qu'ils se connaissaient, Ailam s'était toujours montré très protecteur envers la demi-déesse, bien qu'elle soit plus âgée que lui. De façon amicale et fraternelle au départ. Et puis, de manière bien plus sévère à mesure des années. Il devait bien se rendre à l'évidence : il était amoureux d'elle. Et jamais n'accepterait-il qu'un autre homme ne l'approche. Et surtout pas lui, ce fils de Dionysos à qui il rêvait tous les soirs de refaire le portrait.

Lui prenant les mains, il l'attira à l'écart des autres bungalows, un peu plus en retrait du centre de la colonie et des autres pensionnaires. Hors de question qu'elle défile dans cette tenue à la vue de tout le monde. Un peu trop possessif sur les bords, sans aucun doute. Je peux savoir pourquoi un changement aussi radical dans ta garde à robe ?